Voici une lettre de la présidence de l'Ordre aux sénateurs, ça donne des idées sur la considration du gouvernement et de la majorité sur la profession infirmière:
Conseil National de l’Ordre des Infirmiers
Dominique LE BOEUF
Présidente
116 rue de la Convention
75015 PARIS
Port. : 06 10 83 47 13
ordre-infirmier.national@orange.fr
Réf : DLB/SG/ 24
Paris le 19 mai 2009
Monsieur le Sénateur,
Madame la Sénatrice,
Nous venons de découvrir avec stupéfaction que Gouvernement a déposé à l’article 19 quater du projet
de loi HPST un amendement n° 1278, dont les I à V visent l’Ordre national des infirmiers.
Cet amendement surgit avec brutalité, dans les dernières heures du débat parlementaire qui doit voir la
réforme des Ordres de santé. Il n’y a pas eu à ce sujet le moindre début de concertation avec les élus
démocratiquement choisis par les infirmiers. On ne s’est même pas embarrassé d’un simulacre
d’information.
Ce mépris apparaît peu croyable, venant après les leçons d’un processus législatif déjà obéré par de
lourdes fautes d’appréciation dans diverses parties du projet du gouvernement.
Qu’en est-il du but recherché ici : est-il de contribuer à un meilleur fonctionnement du système de santé ?
Aider à mieux traiter les malades ? S’appuyer, pour cela, sur les infirmiers eux-mêmes, et leur aspiration
à renforcer la qualité des soins ? Economiser d’une quelconque façon les deniers publics ?
Nullement, bien au contraire : il ne s’agit que d’entraver autant qu'on le pourrait l’Ordre des infirmiers
cette institution indépendante, née en 2006 de l'initiative du Parlement, pour promouvoir à la fois
l’éthique et la qualité des soins, et l'avenir d'une profession de 490 000 infirmières et infirmiers, en
partenariat naturel avec les Autorités de santé.
Un Ordre national qui est bien déterminé à remplir cette mission de service public, même si elle dérange
le confort de certains.
L'amendement vise à dénaturer totalement le texte élaboré par votre Commission des Affaires sociales. Il
prétend en effet :
I. Supprimer la vérification des conditions "de compétence, de moralité et d'indépendance" requises pour
pouvoir exercer. Or, cette vérification est au fondement même du rôle d'un Ordre professionnel, et elle est
précisément réaffirmée à l'article 19 ter (I et XXIX) du projet de loi, pour les quatre professions médicales
et pharmaceutique. Serait-ce superflu pour les infirmiers ? Leur qualité n'est-elle pas cruciale pour la
santé, et souvent la vie, des patients qu'ils soignent ? On croit rêver.
II. Ne pas permettre à l'ordre de "développer la compétence indispensable à l'exercice de la profession",
ni de "contribuer à promouvoir la santé publique et la qualité des soins".
Or, la première de ces missions est donnée aux Ordres des quatre professions précitées depuis la loi du 4
mars 2002 relative à la qualité du système de santé. Ils l'assurent de multiples manières, au bénéfice
évident de l'intérêt des malades.
La seconde a été confiée à l'Ordre des pharmaciens par la loi du 19 décembre 2005 (art. L. 4231-1 du
CSP), à l'initiative, déjà, du Sénat... Depuis lors, l'ONP a réalisé et mis en oeuvre le Dossier
Pharmaceutique, seul dossier électronique national de santé qui fonctionne dans notre pays. A-t-on aussi
l'intention de retirer cette mission à l'ONP ? Au nom de quels intérêts non révélés l'ONI ne devrait-il pas,
lui aussi, "contribuer à la santé publique et à la qualité des soins" ? Il y a là, pour les infirmières et les
infirmiers, une manifestation de mépris, gratuite et insupportable.
III., IV. et V. : Ces autres paragraphes de l'amendement qui visent l'ONI témoignent de la même volonté
de l'affaiblir au maximum : réduire sa représentativité sur le terrain ; affaiblir les ressources de sa
cotisation ; enfin, précariser le mandat de ses élus en "déclassant" sa durée, renvoyée à un décret, c'est à
dire placée à la discrétion du pouvoir réglementaire.
Cet ensemble, très cohérent dans son inspiration, constitue une tentative majeure de déstabilisation.
Outrageante pour les infirmiers dans sa méthode et, à l'évidence, contraire à l'intérêt général dans toutes
ses dispositions. A notre sens, le Parlement ne peut y consentir.
La profession tout entière a élu, dans les conseils de l'ONI, ses légitimes représentants pour garantir et
développer la qualité de son exercice au bénéfice des patients et du système de santé.
Aussi, en son nom, nous vous demandons solennellement de bien vouloir rejeter
en bloc les paragraphes I à V de l'amendement 1278.
Nous vous en remercions profondément à l'avance.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Sénateur, Madame la Sénatrice, l'expression de notre considération la
plus distinguée.
Dominique LE BOEUF
Présidente du Conseil national
de l'Ordre national des Infirmiers